30.5.04
Il s'est à nouveau passé de drôles de choses durant cette séance du Tribunal.
Jamais deux sans trois
Bien que la séance ait duré en tout près de quatre heures et demie, elle n'a pas permis de faire avancer le procès. En effet, il y a eu deux longues interruptions de séances, qui plus est chaque fois pour le même motif.
Après une courte discussion avec Mikhail Khodorkovski et ses avocats, la juge Irina Kolesnikova se rend compte que dans l'exemplaire de l'acte d'accusation qui a été remis à Mikhaïl Khodorkovski il manque une feuille (sur les huit cents qu'il comporte). Khodorkovski et ses avocats répondent que ce n'est pas là une infraction notable à la procédure, car ils ont eu précédemment l'occasion de prendre connaissance du contenu de cette page. Mais la juge décide que c'est un manquement inacceptable aux droits de l'accusé et envoie le procureur photocopier de nouveau la totalité du dossier. Une heure après environ, celui revient avec une copie fraîche. Hélas ! Un examen superficiel permet de se rendre compte qu'il manque cette fois trois ou quatre pages. Les avocats réaffirment que ce n'est pas pour eux essentiel mais la juge est inflexible. Le procureur retourne faire une troisième copie.
En attendant les avocats sortent dans la cour fumer et partager leur perplexité avec les journalistes. "Quel cynisme, toute cette agitation pour une seule page alors qu'on ne nous a pas laissé le temps de prendre correctement connaissance des 237 tomes du dossier!" s'exclame Karinna Moskalenko, tandis que pour Iouri Schmidt, cela cache quelque chose : "Pour des raisons qui nous échappent, le tribunal n'est visiblement pas prêt à examiner le fond de l'affaire, ou bien il attend des instructions".
Deux poids deux mesures
Lorsque la séance a enfin repris, et que Mikhaïl Khodorkovski et ses avocats ont compté eux-mêmes toutes les pages du document, le représentant du Ministère des Impôts et Recettes, qui est partie civile dans le procès, demande un report de séance afin de bénéficier d'un délai supplémentaire pour prendre connaissance du dossier. La juge décide alors de reporter la séance au 8 juin. Elle prendra ensuite la même décision, dans l'après-midi, concernant le procès Lébédev.
Qui donc retarde le procès ?! En avril, le tribunal Basmanny avait accusé Mikhaïl Khodorkovski de faire traîner la période de lecture du procès (237 tomes étudiés en cinq mois, soit environ deux par jour puisque malgré sa demande il n'avait pas obtenu le droit de pouvoir les consulter les dimanches et jours fériés) et il avait fixé arbitrairement un terme à cette période, satisfaisant ainsi la plainte déposée par… ce même Ministère des Impôts et Recettes. Qui à présent demande un report de séance…
Pendant ce temps, à l'extérieur…
Pendant ce temps, à l'extérieur, et dans les couloirs du tribunal (la séance se déroulant à huis-clos) les journalistes se bousculent pour essayer d'apercevoir Mikhaïl Khodorkovski. La tâche n'est pas facile par l'ex-PDG de Ioukos est encadré d'une escorte impressionnante de policiers qui le protègent d'éventuels snippers et des objectifs des photographes par des sortes de boucliers d'acier. Les parents de Kohodorkovski sont là également, sa mère est montée sur un banc pour tenter d'entrevoir son fils ne serait-ce que quelques secondes, car on ne l'a pas laissée entrer dans la salle d'audience. Elle restera dans cette position presque tout le temps que durera l'audience. Vers la fin elle se décide à dire quelques mots aux journalistes. Elle se dit sûre de l'innocence de son fils – "Je sais comment je l'ai élevé". "Mikhaïl sait qu'il risque jusqu'à dix ans de prison. Et il y est prêt. Il ne croit plus à un procès équitable." Regrette-t-il de ne pas s'être enfui à l'étranger? "Non, c'est une possibilité qu'il a refusée en toute conscience. Il ne partira jamais et sa famille aussi restera en Russie."
Des partisans de Mikhaïl Khodorkovski, toujours plus nombreux à chaque séance, étaient également venus le soutenir, tenant des affiches à son effigie, des pancartes aux slogans pour le moins inventifs et des ballons de baudruches aux couleurs de la compagnie Ioukos.
29.5.04
La justice russe a reporté au 8 juin l'audience préliminaire, qui devait se tenir vendredi, dans la procédure pour fraude et évasion fiscale visant l'ancien président de la compagnie pétrolière russe Ioukos, Mikhaïl Khodorkosvki.
Cette audience devait initialement fixer la date d'ouverture du procès du magnat russe considéré comme l'homme le plus riche de son pays.
L'ajournement a été demandé par les autorités fiscales, à l'origine des poursuites contre l'homme d'affaires, sur fond d'effondrement des cours boursiers de la société russe et d'inquiétudes sur sa pérennité.
Le groupe, sous le coup d'un redressement fiscal de 99,8 milliards de roubles (3,4 milliards de dollars) pour le seul exercice 2000, a déclaré jeudi qu'il risquait un dépôt de bilan si le fisc russe lui réclame des arriérés d'impôts supplémentaires.
Vendredi, le cours de l'action Ioukos dévissait de près de 11%.
Accusé d'avoir soustrait au fisc plus d'un milliard de dollars, Mikhaïl Khodorkovski, en détention depuis le mois d'octobre, risque jusqu'à dix ans de prison s'il est reconnu coupable.
Depuis son arrestation, la capitalisation boursière de Ioukos, l'une des deux principales compagnies pétrolières russes, a été divisée par deux.
Reuters
C'est ce que demandent les avocats de la défense, les accusés eux-mêmes,et cela semblerait logique. En effet, ils sont accusés des mêmes choses et leur procès doit se dérouler dans le même tribunal. De plus, suivant le Parquet Général, ils sont accusés d'avoir agi "en bande organisée" (sic!) ce qui indique bien que dans l'esprit de l'accusation les deux affaires sont liées. De plus dans la même affaire que Khodorkovski doit passer en jugement un certain Kraïnov, directeur de la firme Volga qui avait été le premier acquéreur des actions de l'entreprise d'engrais APATIT, or les soi-disantes irrégularités commises lors de la privatisation de cette entreprise sont le principal chef d'accusation dans le procès Lénédev.
28.5.04
La Cour d'Arbitrage de Moscou a reconnu la Compagnie pétrolière Ioukos coupable et la condamne à verser à l'Etat 3,5 milliards de dollars.
Personne sans doute ne pensait que la Cour d'Arbitrage rendrait un verdict contraire aux exigences du Ministère des Impôts et Recettes, mais personne ne s'attendait non plus à un tel mépris des apparences mêmes de la justice.
Un procès bâclé !
Trois jours à peine ont été nécessaires pour examiner une affaire dont l'acte d'accusation comportait 432 tomes! Pourquoi une telle hâte? Parce qu'il importait pour l'accusation que le verdict soit rendu avant le commencement des auditions préliminaires du procès Khodorkovski. L'accusation avait d'ailleurs demandé que la Cour siège même la nuit. Cependant, les représentants du Ministère se sont révélés incapables de tenir le rythme qu'ils avaient eux-mêmes imposé. Lorsqu'ils ont commencé à se perdre dans leurs propres dépositions et à égarer des déclarations d'impôt, la cour a tout de même décidé de faire une pause pour la nuit...
Des conditions inégales
La cour n'a donné que quelques heures aux avocats de la compagnie pour prendre connaissance du dossier de l'accusation.
De plus, elle ne leur a pas permis de s'exprimer : durant ces trois journées, l'accusation a monopolisé la parole. Lorsque les avocats de la défense protestaient ou essayaient d'opposer leurs arguments, le juge Grechinshkine les en empêchait en affirmant qu'il leur donnerait la parole "plus tard". Finalement, ceux-ci n'ont eu le droit de parler que trois heures. Contre vingt-trois heures pour l'accusation.
Une approche tendancieuse
On ne peut que s'étonner également de ce que toutes les accusations des representants du Fisc aient été acceptées sans même être être examinées (le juge n'a pas même pas consulté la moitié des tomes constituant le dossier d'accusation), alors même que ceux-ci s'embarrassaient dans leurs propres arguments, tandis que toutes les objections, requêtes et protestations de la défense ont été rejetées. Le juge n'a écouté aucun argument de la défense, même les plus logiques. Par exemple le fait que "le Fisc reconnaît l'existence et la légitimité des compagnies lorqu'elle prend en compte les versements que celles-ci font au Trésor Public, mais lorsqu'ils s'agit des réductions d'impôts auxquelles elles ont droit - le Fisc declare subitement que ces compagnies sont fictives et décide de présenter la note correspondant à ces réductions à la compagnie Ioukos"
Et après?
La compagnie Ioukos va évidemment faire appel de ce jugement, mais peut-elle vraiment espérer faire valoir ses droits? Dans un communiqué de presse, elle a fait savoir qu'elle n'excluait pas l'éventualité d'une mise en faillite, surtout si le Ministère se livre au même genre de redressement fiscal pour les années 2001, 2002 et 2003.
Ce qui est devenu l'affaire Ioukos a commencé en juillet dernier avec les premières poursuites judiciaires lancées contre le groupe pétrolier russe et ses dirigeants. Elle est largement vue en Russie comme ayant pour objectif de mettre au pas un groupe jugé trop indépendant par le Kremlin, dont le patron affichait en outre des ambitions politiques.
La Cour d'arbitrage de Moscou a condamné mercredi 26 mai le groupe pétrolier russe Ioukos à verser au ministère des impôts 99,4 milliards de roubles (3,5 milliards de dollars), selon l'agence Interfax. La Cour a ainsi reconnu les arguments du fisc demandant cette somme au numéro un du pétrole russe au titre d'impayés pour l'année 2000.
"Nous allons recommander à notre client de faire appel de ce jugement et du point de vue légal nous avons toutes les chances de gagner cette affaire", a assuré Me Sergueï Pepelaev, l'avocat représentant les intérêts de Ioukos, cité par Interfax.
Ioukos estime ne rien devoir au fisc, avançant que les schémas de minimisation fiscale utilisés à l'époque par ses filiales étaient légaux, mais aucun analyste ne s'attendait sérieusement à ce que le groupe gagne devant la justice.
"Cette décision était attendue vu les circonstances politiques de l'affaire, j'ai juste été surpris de la rapidité du jugement (...). Il n'y a pas eu de bataille judiciaire", a déclaré Ron Smith, analyste de la société d'investissement Renaissance Capital.
D'autres accusations d'évasion fiscale pour les années 2001 à 2003 pourraient être "imminentes" et pourraient rajouter de 3 à 3,5 milliards de dollars à l'addition, estiment les experts.
Les signaux d'alerte sur la situation financière de Ioukos se sont multipliés ces deux derniers mois et les principaux créanciers du groupe ont prévenu qu'ils pourraient réclamer un remboursement anticipé de 3,6 milliards de dollars de crédits.
FAILLITE OU MAINMISE DE L'ETAT SUR IOUKOS
"Les chances d'une faillite de Ioukos sont de 50 %", l'autre solution étant que l'Etat réussisse à mettre la main à l'amiable sur la part de Ioukos détenue par ses principaux actionnaires au sein de la holding Menatep, a estimé Ron Smith.
Ce qui est devenue l'affaire Ioukos a commencé en juillet dernier avec les premières poursuites judiciaires lancées contre le groupe et ses dirigeants. Elle est largement vue en Russie comme ayant pour objectif de mettre au pas un groupe jugé trop indépendant par le Kremlin, dont le patron affichait en outre des ambitions politiques.
L'ex-patron et principal actionnaire du groupe, Mikhaïl Khodorkovski, considéré comme l'homme le plus riche de Russie, est incarcéré depuis le 25 octobre 2003, inculpé d'escroquerie et d'évasion fiscale à grande échelle.
Les auditions préliminaires de son procès commenceront vendredi.
Le Monde / AFP
26.5.04
La Cour Européenne : "L'affaire Goussinski ? Du racket d'Etat."
"Racket d'Etat" - c'est, en gros, ce dont la Cour Européenne a reconnu coupable la Russie, en la condamnant à verser 88 000 $ à Vladimir Goussinski. Goussinski, on s'en souvient, avait été accusé de graves délits économiques et emprisonné durant trois jours à la prison de la Boutyrka à Moscou. Après qu'il eut consenti à céder son empire médiatique à Gazprom, un conglomérat proche du pouvoir auprès duquel la société de Goussinski, "média-most" était endettée, il avait été libéré et les poursuites contre lui avaient été abandonnées. Aujourd'hui, Vladimir Goussinski est en exil.
La décision de la Cour européenne ( que l'on peut consulter en anglais sur internet) est un précédent important, car elle marque la prise de conscience de ce que le système est en Russie instrumentalisé par le pouvoir. Elle dit notamment (p.19)
76.In the Court’s opinion, it is not the purpose of such public-law matters as criminal proceedings and detention on remand to be used as part of commercial bargaining strategies. The facts that Gazprom asked the applicant to sign the “July Agreement” when he was in prison, that a State Minister endorsed such an agreement with his signature, and that a State investigating officer later implemented it by dropping the charges, insistently suggest that the applicant’s prosecution was used to intimidate him.
77.. In such circumstances the Court cannot but find that the restriction of the applicant’s liberty permitted under Article 5 § 1 (c) was applied not only for the purpose of bringing him before the competent legal authority on reasonable suspicion of having committed an offence, but also for alien reasons."
Donc, en d'autres termes, la mise en détention de Goussinski est une mesure d'intimidation dont se sont rendus complices un Ministre d'Etat et un juge d'instruction. Si pour trois jours de prison la Russie a été condamnée à verser à V. Goussinski 88 000 $, combien devra-t-elle verser à M. Khodorkovski pour 7 mois (pour le moment) de détention ? Celui qui me donnera la bonne réponse gagnera un badge du groupe SOVEST.
L'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe s'inquiète de l'affaire Ioukos
Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, la rapporteuse nommée par l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) pour enquêter sur les allégations de motivation politique dans l'affaire Ioukos, est arrivée lundi dernier à Moscou. Contrairement à son attente, elle n'a pas été autorisée à rendre visite en prison à Mikhaïl Khodorkovski ni a Platon Lebedev. Le motif invoqué par le Tribunal pour refuser cette visite est que la rapporteuse de l'APCE ne rentre pas dans la liste des personnes autorisées à rendre visite aux accusés détenus. L'argument est parfaitement spécieux puisque :
1) l'hiver dernier un député de la Douma - qui fait partie des personnes expressément autorisées en permanence (sans avoir à demander d'autorisation spéciale) à rendre visite aux détenus - n'a également pas pu rencontrer Mikhaïl Khodorkovski en prison,
2) la dite liste n'est pas limitative.
Droits de l'Homme: Poutine souhaite coopérer avec le Conseil de l'Europe
Il n'y a pas que des mauvaises nouvelles ! Voici une remarquable dépèche de l'AP
Le président russe Vladimir Poutine a affirmé jeudi que Moscou entendait développer "une coopération sérieuse" avec le Conseil de l'Europe et pourrait même lui demander de l'aide en matière de droits de l'Homme sur "certains dossiers très sensibles" pour son pays.
"Nous accordons une attention particulière aux activités d'institutions comme le Conseil de l'Europe", a assuré M. Poutine en recevant au Kremlin le commissaire aux droits de l'Homme du Conseil, Alvaro Gil-Robles. "C'est important pour nous, pour la Russie, pour la relativement jeune démocratie russe. Nous comptons bien sûr sur une coopération sérieuse avec vous, peut-être même sur une assistance sur certains dossiers qui sont très sensibles pour nous", a ajouté le président.
Le Conseil de l'Europe critique régulièrement l'attitude de la Russie dans la guerre en Tchétchénie. Il a aussi reproché à Moscou son attitude avec les médias dans les élections législatives et présidentielle de décembre et mars, et enquête actuellement sur les poursuites engagées contre l'ancien patron du groupe pétrolier Mikhaïl Khodorkovski, en prison depuis octobre.
Alvaro Gil-Robles s'est montré peu expansif à l'issue de son entretien avec Vladimir Poutine, lui déclarant que son "soutien aux droits de l'Homme était très important" pour lui et que Conseil de l'Europe considérait la Russie comme "un pays ami". "Nous devons travailler sur certaines questions difficiles". Il a ajouté avoir "toujours bénéficié du soutien et de la coopération des autorités russes dans l'examen des problèmes tels qu'ils sont vraiment et leur résolution appropriée".
On peut se demander ce que signifie l'expression typiquement diplomatique "problèmes tels qu'ils sont vraiment". Quant à "l'assistance sur certains dossiers particulièrement sensibles" - oh, très volontiers! Cela dit - au vu des deux paragraphes précédents, on peut vraiment se demander si le pouvoir russe n'est pas légèrement schizophrène. Ou supposer que le président a vraiment besoin de l'aide de l'Europe pour lutter contre certaines composantes "extrêmistes" de ce qu'il est convenu d'appeler en Russie "le pouvoir"...
22.5.04
Pour la première fois depuis octobre, le président Poutine a fait un commentaire sur l'affaire Ioukos.
Au cours de la conférence de presse consacrée à l'entrée de la Russie à l'OMC, un journaliste du Financial Times a demandé au président "quel signal il essayait d'envoyer à la société russe par le biais de l'affaire de la Compagnie Pétrolière Ioukos."
"Tout d'abord c'est le Parquet Général qui envoie des signaux, et non pas nous. Le signal principal, c'est qu'il ne faut pas voler, qu'il faut se soumettre à la loi indépendamment de la somme que l'on a sur son compte personnel ou sur celui de son entreprise"
Après quoi le président a ajouté "J'estime inadmissible et incorrect de donner quelque commentaire préventif que ce soit à cette affaire, car ce serait exercer une pression sur l'appareil judiciaire".
Comme c'est touchant ! En terme d'analyse stylistique, on n'est pas loin de la prétérition... Qu'elle est lassante, cette rhétorique du faux-semblant. C'est vraiment la feuille de vigne qui cache... le téléphone. Celui qui reliait les procureurs et les juges à de mystérieux interlocuteurs lors des diverses séances du Tribunal Basmannyj...
21.5.04
Pour la première fois depuis l'arrestation - si l'on ne compte pas le défilé des démocrates du 1er mai - des gens sont descendus dans la rue pour protester contre le maintien en détention de Mikhaïl Khodorkovski. Le meeting avait une signification plus large - pour la libération des détenus politiques, soit M.Khodorkovski, son associé Platon Lébédev, le scientifique accusé d'espionnage et récemment condamné à une très lourde peine de prison Igor Soutiaguine et l'avocat des victimes de la prise d'otages de l'automne 2002 Mikhail Trepachkine. Le meeting était organisé par les "radicaux" de Nikolaï Khramov, et le groupe SOVEST. Y participaient différentes associations de défense des droits de l'homme, notamment celle de Lev Ponomarev et l'Union Démocratique de Valeria Novodvorskaïa. Ballons, tee-shirts, tribune... il ne manquait rien.
Parmi ces quatre détenus, seul Soutiaguine a été pour le moment reconnu prisonnier politique par Amnesty International. Sans doute parce que son affaire est révélatrice du regain des affaires dites d'espionnage en Russie, et que le jugement porté par un jury d'assise dont on dit qu'il a pu être manipulé par le FSB est largement disproportionné par rapport à ce dont Soutiaguine est accusé (rappelons qu'il n'avait pas accès à des sources d'information secrète).
Mais si quelqu'un mérite bien le titre de prisonnier politique, ou de prisonnier de conscience, c'est tout de même bien Mikhaïl Khodorkovski. Par quel bout que l'on prenne cette affaire, elle est éminemment politique. Passons sur son soutien ostensible aux partis d'opposition. Même si l'on considère que Khodorkovski est poursuivi pour des délits économiques qu'il a effectivement commis - ce qui est plus que discutable. En effet les schémas de minimisation des impots qu'on l'accuse d'avoir utilisé, ce n'est pas lui qui les a inventés, il n'était pas seul à le faire, et ils exploitaient des failles encore existantes dans la législation. Il s'agit donc moins de le punir lui que de faire en sa personne un exemple susceptible de faire passer le goût du risque à ses collègues hommes d'affaires. Donc de résoudre par des moyens judiciaires une tâche qui relève du politique et du législatif. C'est inadmissible dans un Etat de droit!
Heureusement, de plus en plus de gens, même en Russie, commencent à s'en rendre compte.
20.5.04
"Trust" et "MENATEP SPB changent de main
Mikhail Khodorkovski et Platon Lebedev ont parait-il vendu leurs parts de ces deux pieces de leur empire. Les nouveaux propriétaires sont les directeurs de la banque, avec Ilya Iourov à leur tête. Remettre la banque à flot en lui permettant de prendre ses distances vis-à-vis des problèmes judiciaires de ses anciens propriétaires - tel est le but avoué et fort avouable de l'opération. Faut-il chercher un sens caché... ?
Qui joue au yoyo avec les actions de Yukos ?!
Une nouvelle mise en garde faite à la compagnie concernant un possible défaut de paiement et l'annonce de nouvelles perquisitions au siège central avaient fait chuter ce matin les actions de 8%. Elles ont remonté d'autant dans l'après-midi après un autre effet d'annonce, plus positif celui-là : la suspension par le Tribunal d'Arbitrage de la mise en demeure par le Ministère des Impots et Contributions de payer 99 milliards de roubles d'impots non perçus et d'amendes. La décision est suspendue jusqu'au 28 mai. Est-ce un détail formel ou un vrai bol d'air pour Yukos (l'effet Gerashchenko :-)?) - en tout cas, certains speculateurs doivent amasser des fortunes...
Le supplément de dimanche du Financial Times a publié une enquête sur le rôle du défunt directeur de la Banque Menatep Steven Kurtis dans les montages financiers du groupe. Il est possible de prendre connaissance de l'article dans sa version russe :
Article
Comme à chaque fois que sont employés les mots "offshore", "Gibraltar", "Ile de Man", une vague de réprobation agite le public russe bien-pensant. On peut se demander tout de même où le parquet général avait les yeux alors que de nombreux journalistes russes, notamment ceux de la Novaya Gazeta, avaient donné une description assez exacte de ces schémas il y a déjà quatre ans de cela.
Et on peut se demander où ils ont les yeux aujourd'hui encore quand ces mêmes journalistes mettent à jour le même genre de schémas, mais concernant d'autres groupes et d'autres "oligarques", moins distants du pouvoir que Mikhail Khodorkovski (ah, comment traduire en français le doux terme de равноудаленный)! Bon, on reviendra sur ces questions un jour ou l'actualité sera moins chargée.
Pour le moment je voudrais citer (approximativement) le journal Kommersant, qui voit derrière la publication de ce nouvel article la patte de Kenneth Dart.
Vous vous souvenez de qui est Kenneth Dart? Non? Alors, que le suspense dure encore un peu. Bonne nuit.
Bienvenue dans mon Observatoire personnel du Procès Khodorkovski.
Lundi dernier - 17 mai 2004 - le dossier d'instruction a été transmis, a-t-on appris, au Tribunal Meshchanskij de Moscou, celui-là même qui est également chargé d'examiner l'affaire Lebedev, et qui a déjà porté un jugement dans l'affaire Shakhnovski.
Ainsi donc, on peut dire que l'affaire Khodorkovski entre dans une nouvelle phase, ce qui fournit le prétexte formel idéal à la création de cet "observatoire".
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