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31.5.05

Libération: Un businessman formé au Konsomol

A la tête de la première fortune russe avant son arrestation, Mikhaïl Khodorkovsky s'était mis à défier ouvertement Vladimir Poutine.

par Lorraine MILLOT

«Ma vocation n'était pas d'être un dissident! Je suis un homme d'affaires!» En juillet 2003, alors que les poursuites s'intensifiaient contre lui, Mikhaïl Khodorkovski avait lui-même souligné l'absurdité de son nouveau rôle de martyr. De fait: il est aujourd'hui la victime d'un arbitraire politique qui auparavant lui avait permis d'assembler la plus considérable fortune de Russie, estimée à 15 milliards de dollars avant son arrestation.

Né à Moscou en 1963 de parents ingénieurs, Mikhaïl Khodorkovski s'est lancé dans les affaires en tant que militant des Komsomol (les jeunesses communistes). Il a commencé petit, par l'importation de jeans ou d'ordinateurs, mais il a surtout su nouer très tôt des contacts hauts placés dans la hiérarchie du parti communiste et au Kremlin. Sa banque Menatep, qui fut l'une des toutes premières banques privées autorisées en URSS, a servi à placer à l'étranger les fonds de ministères ou de la compagnie d'Etat chargée des exportations d'armes. Tout cela se passait à l'époque en étroite connivence avec certains officiers du KGB, qui ont couvé ces premiers businessmen soviétiques.

Grâce aux premiers millions amassés par Menatep, Khodorkovski est l'un des oligarques de la cour de Boris Eltsine, qui profitent le plus des privatisations. En 1995, il met la main sur le groupe pétrolier Ioukos, payé au prix dérisoire de 350 millions de dollars. De Ioukos, il fait l'un des groupes pétroliers russes les plus efficaces. Mais Khodorkovski se fait d'abord connaître surtout pour son génie des montages financiers, qui permettent de filouter créanciers ou actionnaires minoritaires et de faire disparaître un maximum d'argent off-shore. «Micha est un manager extrêmement dur, reconnaissait sa deuxième épouse, Inna, dans une récente interview. Son principe pour apprendre à nager à quelqu'un: jetez-le dans l'eau! S'il surnage, c'est qu'il est bon. Sinon, qu'il se noie.»

A partir de 1999, Khodorkovski avait pourtant tenté de se convertir en manager à l'occidentale, jurant de faire de Ioukos le groupe «le plus transparent» de Russie. Fort de ses appuis aux Etats-Unis, c'est là qu'il avait commencé à dénoncer les magouilles politico-financières et la corruption ambiante au Kremlin. Il s'était mis à défier ouvertement Poutine, annonçant qu'il finançait désormais plutôt les partis d'opposition. Pour parachever sa mue, il s'apprêtait à vendre 25% de Ioukos à une major américaine. Le bruit courait déjà qu'il briguerait la place de Poutine en 2008. C'est à ce moment que le Kremlin l'a fait arrêter, en octobre 2003. Aussi digne et entêté qu'il était ambitieux, il a depuis assuré, du fond de sa prison: «Je ne regrette rien».
24.5.05

Le Nouvel Obs : Khodorkovski : deuxième semaine de jugement

La lecture de l'énoncé du jugement de Mikhaïl Khodorkovski, accusé d'escroquerie et de fraude fiscale, se poursuit. Dix ans de prison ont été requis.

La lecture de l'énoncé du jugement du milliardaire russe Mikhaïl Khodorkovski, fondateur et ex-patron du géant pétrolier Ioukos, a repris lundi 23 mai dans un tribunal de Moscou, entrant dans sa deuxième semaine.
La juge, qui la semaine dernière avait commencé par "établir" les faits dont les accusés (Mikhaïl Khodorkovski et son associé Platon Lebedev) sont jugés coupables, poursuivait lundi la lecture de l'examen des preuves prouvant leur culpabilité.
Pour le détournement de fonds provenant des ventes d'engrais de la société Apatit, "la culpabilité de Khodorkovski et Lebedev est prouvée par...", déclare la juge Irina Kolesnikova qui commence à énumérer les preuves.
La lecture du jugement, épilogue d'un procès ayant débuté il y a onze mois, avait débuté le 16 mai dernier, et pourrait se poursuivre encore plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

Culpabilité certaine

Irina Kolesnikova a décidé de lire l'intégralité des textes constituant le jugement, soit plus d'un millier de pages avant de prononcer la sentence finale, lues à raison d'une cinquantaine de pages par jour.

Le tribunal a "de facto" déjà reconnu la culpabilité des accusés pour 10 des 11 chefs d'accusation relevant de sept articles du code pénal: fraude fiscale à titre personnel et en tant que personne juridique, acquisition frauduleuse d'actions de l'Institut des engrais, détournement de fonds provenant des ventes d'engrais d'Apatit, escroquerie préméditée et en "groupe criminel organisé, dirigé par Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev"...

Punir ou pas ?

Mais personne ne peut encore présager de la sentence qui sera prononcée.
Le tribunal doit terminer la lecture de l'examen des preuves pour chacun des faits établis, puis donner son interprétation juridique des faits prouvés, et enfin dire s'il faut ou non punir les coupables.
La lenteur exceptionnelle du tribunal à faire connaître sa sentence est critiquée par les avocats de l'accusé et la presse comme une manoeuvre pour réduire l'impact du verdict dans l'opinion publique.
Le Parquet a requis dix ans de prison contre Mikhaïl Khodorkovski, accusé notamment d'escroquerie et fraude fiscale "à grande échelle et en groupe criminel organisé", dans une affaire largement considérée comme politique.

(Le Nouvel Obs, 24.05.2005)
22.5.05

AFP : Site internet russe sur prisonniers politiques: de Khodorkovski à Mandela

Un site internet russe recensant les "prisonniers politiques" de la Russie post-soviétique, et mettant en parallèle l'ex-patron de Ioukos Mikhaïl Khodorkovski et Nelson Mandela, a été présenté vendredi à Moscou, au siège de l'Union des journalistes russes.

"Les nouveaux prisonniers politiques russes sont les descendants directs des prisonniers politiques de l'époque soviétique", soutiennent les créateurs du site réalisé avec le soutien du centre de presse des avocats de Mikhaïl Khodorkovski, en collaboration avec des ONG de défense des droits de l'Homme.

On y voit défiler le portrait de Khodorkovski au côté de celui de Vaclav Havel qui a passé cinq ans dans les geôles communistes avant de devenir président tchèque, celui de Grigori Pasko, journaliste russe condamné pour trahison au côté de celui du Mahatma Gandhi, ou encore du chercheur Igor Soutiaguine, condamné à 15 ans de prison pour espionnage, au côté de Nelson Mandela.

"Soutiaguine, Khodorkovski, Lebedev, Trepachkine, Mourtazalieva... Ces citoyens de notre pays sont réunis par une chose: tous sont les victimes de persécutions politiques", peut-on lire sur la page d'accueil du site politzeki.ru montrée lors d'une conférence de presse à Moscou.

Le site présente un résumé d'autant de procès "fabriqués" selon ses créateurs: Platon Lebedev, co-accusé de Khodorkovski, Mikhaïl Trepachkine, avocat emprisonné des familles de la prise d'otages de la Doubrovka, Zara Mourtazalieva, Tchétchène reconnue coupable d'avoir fomenté un attentat.

"Il ne faut pas se battre pour une personne, mais contre tout le système" judiciaire, a déclaré Irina Khakamada, seule représentante de l'opposition libérale à s'être opposée à Vladimir Poutine lors de la présidentielle de mars 2004, saluant la création du site lors de sa présentation à Moscou.

Elle a dénoncé "la mise en place d'une machine répressive" à travers les tribunaux russes.

(AFP via Menara, 22.5.2005)
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Adresse du site : http://www.politzeki.ru
20.5.05

Le Monde : La justice russe entérine la chute de l'oligarque Khodorkovski

Vingt-deux mois de procédure, 1 000 pages de verdict, des prévenus en cage et un dispositif de 500 policiers autour du tribunal : le dernier acte du procès de Mikhaïl Khodorkovski s'est joué, mardi 17 mai, lorsque les trois juges du tribunal Mechtchanski de Moscou ont déclaré l'ancien patron de Ioukos, numéro un du pétrole russe, coupable d'escroquerie et d'évasion fiscale à grande échelle.

Il s'agit d'un des onze chefs d'inculpation retenus contre l'ancien "golden boy" des milieux d'affaires mais ses avocats s'attendent à un verdict de culpabilité pour toutes les autres charges. Mikhaïl Khodorkovski comparaît, comme il est d'usage en Russie, en cage, aux côtés de son ancien associé Platon Lebedev. Les deux hommes risquent dix ans de prison, peine requise par le procureur.

A la fin de la troisième heure de lecture des 1 000 pages de documents qui composent le verdict, le tribunal a annoncé une suspension jusqu'à mercredi matin, suscitant la colère des avocats, contrariés par cette deuxième interruption d'audience depuis le début de l'énoncé du verdict, lundi. "A ce rythme-là, le jugement va durer des semaines" , a dénoncé Elena Lipster, l'avocate de Platon Lebedev.

Apparemment détendus, les deux anciens associés se sont prêtés, depuis leur cage, aux objectifs des caméras, échangeant des petits signes avec les parents et amis venus les soutenir. Tous deux avaient apporté de la lecture, des mots-croisés pour Platon Lebedev, une revue d'informatique pour Mikhaïl Khodorkosvki.

Arrêté il y a dix-sept mois, le patron de Ioukos, âgé de 41 ans, qui voit l'Etat lui réclamer 27,5 milliards de dollars d'arriéré fiscal, dénonce le procès comme une affaire fabriquée de toutes pièces contre lui pour capter ses avoirs et son entreprise. De fait le joyau de Ioukos, son unité de production Iouganskneftegaz a été vendue aux enchères en décembre 2004 dans des circonstances controversées. Elle a, à l'époque, échu à Igor Setchine, un proche de Vladimir Poutine placé à la tête de la compagnie pétrolière Rosneft.

Dehors, aux abords du tribunal, deux groupes de manifestants se faisaient face. Les uns étaient venus pour défendre Mikhaïl Khodorkovski, victime selon eux d'un "procès politique" orchestré par le Kremlin. La police ne leur a guère laissé de paix : vingt-huit d'entre eux ont été brièvement interpellés. Quelques hommes politiques en vue tel Garry Kasparov étaient venus manifester leur soutien au jeune oligarque. "Je n'ai aucun espoir de voir intervenir un verdict juste" , a déploré l'ancien champion du monde des échecs, qui se positionne en prévision de l'élection présidentielle de 2008.

INQUIÉTUDE DES INVESTISSEURS

Les autres, en face, venus réclamer justice envers les oligarques, "ces pilleurs de l'Etat russe" , étaient beaucoup plus libres de leurs mouvements. Leurs banderolles disaient : "Notre avenir dépend de la décision du tribunal" ou encore : "Rendez-nous notre argent !" Honnis pour avoir acquis pour une bouchée de pain les fleurons de l'industrie nationale à l'époque de Boris Eltsine, les oligarques ne sont pas vus d'un bon oeil par toute une frange de la population qui leur reproche, non sans raison, d'avoir englouti les économies des petites gens lors du krach financier de 1998.

Ce fut le cas de la Menatep, la banque de M. Khodorkovski et de ses associés, laquelle laissa sur le carreau de nombreux épargnants. Ceux-ci n'ont jamais été remboursés. "Il faut que le juge lui prenne tout ce qu'il a gagné, mais bien sûr dans tout cela c'est Boris Eltsine le coupable" , s'est égosillé un vieil homme.

Le procès est suivi de près par de nombreux acteurs de la vie économique, rendus inquiets ces derniers temps par les poursuites fiscales intentées à d'autres compagnies importantes, dont l'opérateur de téléphonie mobile Sviazinvest et la joint-venture du pétrole BP-TNK. L'arrestation de l'oligarque en 2003, par des hommes cagoulés et lourdement armés, avait provoqué un vent de panique dans les milieux d'affaires et une recrudescence de la fuite des capitaux à l'étranger.

Alors que l'énoncé du jugement a repris mercredi matin, des réactions internationales se sont fait entendre dès mardi. Se gardant de commenter le jugement en cours sur le fond, la Commission européenne a rappelé combien il était important pour les investisseurs étrangers que la Russie se dote d'un cadre "transparent" . Les Etats-Unis se sont montrés plus fermes : "La façon dont l'affaire a été menée a entamé l'image de la Russie et érodé la confiance à l'égard des institutions judiciaires" , a déclaré, mardi, Richard Boucher, le porte-parole du département d'Etat.

Marie Jégo
(Le Monde, 18.05.2005)

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Au sujet des manifestants "anti-Khodorkovski" - il faut quand même préciser que la presse russe a les plus grands doutes quand à la spontanéïté de ces manifestarions. Ainsi, des "manifestants" ont été vus embarquant des pancartes dans un car aux abords d'un des immeubles du FSB (les services secrets russes), d'autre part, certains d'entre eux ont affirmé recevoir 300 roubles de l'heure pour leur présence autour du tribunal. Enfin, lorsque, par un jour de pluie, les manifestants ont tenté de deserté leur poste pour se mettre à l'abri, la police les a obligés à poursuivre leur manifestation !!!
19.5.05

Libération : A Moscou, le verdict sans fin du procès Ioukos

L'ex-oligarque Khodorkovski devrait être condamné pour fraude fiscale.

Par Lorraine MILLOT

Cordons de policiers barrant l'accès au tribunal, maîtres-chiens pour faire renifler les suspects, et faux manifestants appelant Poutine à «défendre la Russie» : la fin du procès de Mikhaïl Khodorkovski est en train de tourner à la démonstration de force. Depuis lundi, les trois juges du tribunal Mechtchanski de Moscou ont entrepris de lire un verdict long de près d'un millier de pages et qui, pour l'essentiel, reprend l'acte d'accusation contre l'ancien patron du groupe pétrolier Ioukos. En quatre jours de monotone lecture, le tribunal a déjà reconnu Mikhaïl Khodorkovski et son complice Platon Lebedev coupables de fraude fiscale et escroquerie préméditée, mais les juges continuent à faire durer le suspense quant à la peine qui leur sera infligée. Le parquet a requis dix ans d'emprisonnement. «On dirait que la tâche du tribunal est de noyer dans ce torrent de mots le fond du problème», observait hier l'un des avocats de Khodorkovski, Iouri Schmidt, qui dénonce un procès «politique». «Ils citent une masse de documents, décrets, statuts et autres instructions pour donner l'impression qu'une abondance de faits étaye l'accusation.» Impassibles à ce flot, Platon Lebedev fait des mots croisés pendant l'audience, tandis que Mikhaïl Khodorkovski lit ou communique par sourires avec ses parents dans le public.

Toute la semaine, la télévision russe, qui est sous le contrôle du Kremlin, aura ainsi pu montrer au pays quelle application la justice met à conclure ce procès et comment, devant le tribunal, des «manifestants» appellent à châtier sévèrement ces oligarques. «Poutine, protège-nous de Khodorkovski !», «Les voleurs, en prison !», «Khodorkovski a voulu nous voler notre avenir !», clament les banderoles de ces quelques dizaines de «manifestants», longuement montrés à la télévision. Arrivant par petits groupes organisés, ce sont à l'évidence des «figurants» : des journalistes ont même assuré les avoir vus sortir directement d'un bâtiment du FSB, les services secrets russes. Quant aux partisans de Khodorkovski, qui étaient nettement plus nombreux lundi et qui à force d'enthousiasme commençaient à gagner le soutien des passants dans la rue, ils se sont vu entretemps interdire de manifester devant le tribunal.

(Libération, le 19.5.2005)

L'AGEFI : Khodorkovski : réquisitoire contre la réussite en Russie

Devenir très riche dans l'empire de Vladimir Poutine est mal vu. Surtout quand on est juif, ce que sont les oligarques.

«Un bon oligarque est un oligarque en taule», pensent la plupart des Russes. C'est pourquoi ils sont pauvres. Au football comme en musique, comme dans les affaires, le respect qui entoure la réussite suscite les vocations. Une caractéristique des pays pauvres est que l'élite y préfère la carrière administrative au négoce, l'armée à la production, elle y vit de l'impôt plutôt que de créer la richesse qui le finance.


Un procès qui ne suscite même pas l'indignation

Depuis Custine, nous savons que la Russie est un charmant pays de poètes, de savants et de brutes. La vile fonction de travailler pour s'enrichir était bonne pour les juifs. Sept décennies de socialisme n'ont pas fait progresser les mentalités. Les oligarques sont doublement tarés : ils sont juifs et insolemment riches.

Le mépris des Russes pour leurs meilleurs créateurs de prospérité n'est pas loin d'être partagé à l'étranger. Le procès fabriqué de toutes pièces contre Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev suscite à peine une indignation polie. Le président Bush laisse à sa secrétaire d'Etat le soin d'émettre des réserves. La France des droits de l'homme se tait. Amnesty International, après un an d'atermoiements, publie enfin une vive critique des méthodes poutiniennes, sans néanmoins reconnaître à Mikhaïl Khodorkovski son statut de prisonnier politique (on se demande bien ce qu'il est d'autre).

Est-ce parce qu'ils sont juifs qu'on ne les aime pas?

Pourquoi tant de réticence à l'égard des oligarques? Qu'ils soient juifs s'explique aisément. Ils ont commencé leur carrière dans les années 80, à peine sortis de l'adolescence, lorsque l'administration Andropov a fermé les yeux sur la formation d'un «marché gris» (ce que nous appelons ici un «marché libre»). Mais ce n'est pas parce qu'une activité cesse d'être criminalisée qu'elle devient honorable. Un bon apparatchik n'eût pas voulu que sa fille épousât un «trafiquant»; et donc ceux qui s'engagèrent dans cette activité d'importer des pièces détachées d'ordinateurs (comme Khodorkovski), d'approvisionner les magasins en denrées introuvables, de vendre les surplus des entreprises d'Etat, furent ceux que leur origine ethnique ne destinait pas aux plus hautes fonctions du cursus soviétique, notamment les juifs.

En 1988, Gorbatchev légalisa la création de sociétés privées. Qui d'autre que ces entrepreneurs du marché gris avaient accumulé le capital pour les impulser? Ces jeunes gens se paraient du titre de banquier. Mais pour Ivan le bon Soviétique, ils restaient des juifs indécrottables qui deux ans plus tôt vendaient des choux au cul d'un camion.

Qui avait de quoi payer de tels empires?

Non seulement juifs, donc, mais Crésus. L'économie russe, contrairement à celle des autres pays de l'Est, repose sur l'exploitation de matières premières. Pétrole, minerais, forêts: dame Nature a gâté le pays. Eltsine, devenu président, était pressé par tout l'Occident de privatiser les entreprises d'Etat sclérosées, polluantes, pillées par des dirigeants redevables à des administrations incompétentes et corrompues.

Vendre ces entreprises, donc, mais à qui? Quels Russes avaient les milliards de dollars pour payer le prix de marché d'une Norilsk, le plus grand producteur de nickel et palladium du monde; d'une Loukoïl, dont les réserves pétrolières dépassent celles d'ExxonMobil? Pas les «banquettes» créées trois ans auparavant qui émergeaient à peine de l'économie informelle. Après tout, le but du collectivisme était bien de faire disparaître le capital des mains privées. Alors, distribuer les actions de ces entreprises également à tous les foyers? La solution, brièvement tentée avec les vouchers, consolidait simplement le pouvoir des dirigeants en place, irresponsables devant une masse de petits porteurs indifférents.

Il était politiquement impensable de transférer la propriété des ressources naturelles du pays à des multinationales étrangères, quels que fussent les milliards payés. Le gouvernement russe du président Eltsine a donc pris la seule décision juste pour le bien du pays: il a donné les entreprises d'Etat à ceux de ses citoyens qui avaient manifesté un talent d'entrepreneur.


Juste ou pas juste, ce n'est pas la question

Du jour au lendemain, une douzaine d'oligarques sont devenus milliardaires. Injuste? Pas plus que pour le fermier de l'Oklahoma ou le Bédouin d'apprendre qu'il a du pétrole sous les pieds. Les oligarques qui avaient du talent - et Khodorkovski en débordait - ont rationalisé la production, engagé les meilleurs spécialistes étrangers, investi, développé la production et, sur les profits multipliés, repayaient en impôts ce qu'ils n'avaient pu payer à l'achat. (Car justement, contrairement à ce qu'affirment ses accusateurs poutiniens, Ioukos payait ses impôts. Les réviseurs ne sont pas infaillibles, mais on voit mal comment PriceWaterhouse, qui contrôlait les comptes de Ioukos, aurait pu se tromper de 25 milliards de dollars dans ses calculs, la somme que réclame le fisc russe, soit 2,5 fois le chiffre d'affaires de la compagnie!)

Un pays a les héros qu'il mérite. Les jeunes Américains rêvent d'être les émules de Bill Gates, les Argentins de Maradona. Si les jeunes Russes ne voient pas en Khodorkovski un entrepreneur visionnaire, sobre de moeurs, politiquement libéral et magnifiquement philanthrope, un modèle pour leur avenir, alors leur pays redeviendra vite la proie de ses vieux démons.

Christian Michel, Agefi, 19 mai 2005
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C'est vrai qu'il y a un fort antisémitisme en Russie. C'est vrai qu'on a tendance à faire l'amalgame entre oligarque, juif, riche et ennemi du peuple. Cependant dans le cas de Khodorkovski il faut quand même préciser que seul son père est d'origine juive.
18.5.05

Le Monde : Ioukos, pour l'exemple

e procès Ioukos, du nom de cette grande entreprise pétrolière russe démantelée par le pouvoir, arrive à son terme à Moscou. Son ancien patron, Mikhaïl Khodorkovski, et son associé, Platon Lebedev, attendent depuis dix-sept mois en prison une sentence qui n'a jamais fait aucun doute : coupables. Coupables d'évasion fiscale et d'escroquerie à grande échelle. Ce n'est là qu'un des onze chefs d'accusation. Il faut attendre que les juges aient achevé la lecture des mille pages du verdict pour connaître la sentence. M. Khodorkovski et M. Lebedev risquent dix ans de prison.



Peu importe d'ailleurs la lourdeur de la peine. Ce qui compte pour le Kremlin, qui a mis en scène ce procès avec l'aide d'une justice qui n'a pas perdu ses habitudes de docilité héritées de l'époque communiste, c'est l'exemple donné aux oligarques. On appelle ainsi dans la Russie postcommuniste tous les anciens petits apparatchiks qui, bien placés au bon moment, se sont enrichis quand les entreprises soviétiques ont été vendues à l'encan lors de l'effondrement de l'URSS.

Le pouvoir a donné force publicité au procès de Mikhaïl Khodorkovski. Il faut dire qu'il est le seul de ces oligarques à avoir attendu en Russie ­ inconscience ou provocation ­ que les autorités le prennent pour bouc émissaire. Ses collègues, qui avaient manoeuvré sous Boris Eltsine pour arrondir leur magot, ont fui à l'étranger ou se sont arrangés avec Vladimir Poutine.

Car, contrairement à une légende complaisamment répandue par ses thuriféraires, le président russe n'est pas hostile par principe aux oligarques. Il s'en prend simplement à ceux qui risqueraient de lui faire de l'ombre. C'était le cas de M. Khodorkovski. Non content en effet de financer des médias, journaux et stations de radio ou de télévision critiques par rapport au Kremlin, l'ancien patron de Ioukos soutenait financièrement des hommes politiques d'opposition et rêvait même d'être candidat contre M. Poutine.

En le jetant en prison, en lui réclamant 27,5 milliards de dollars d'arriérés d'impôts, le pouvoir russe a atteint plusieurs objectifs d'un seul coup. Il s'est débarrassé d'un opposant. Il a récupéré les avoirs d'une grande société au profit de compagnies dirigées par des membres de l'administration présidentielle. Et il a jeté en pâture, à une opinion révoltée par les excès du capitalisme sauvage, un coupable qui a l'avantage subliminal d'être d'origine juive, dans un pays où l'antisémitisme reste populaire.

La condamnation de M. Khodorkovski fera certes mauvais effet dans les milieux économiques et financiers internationaux. Elle dissuadera quelques investisseurs étrangers, qui se méfient d'un pays où les règles du jeu sont encore instables et où le racket des entreprises est quasiment officiel. Mais M. Poutine a sans doute pensé que l'inconvénient était mineur. A ses yeux, c'est le prix à payer pour protéger son système de pouvoir, qui reste à la merci des luttes de clans.

(Le Monde, 18.05.2005)
16.5.05

NOVOSTI : Plusieurs dizaines de personnes arrêtées lors du rassemblement en faveur de Mikhaïl Khodorkovski


Moscou 16 mai - RIA-Novosti. Ce lundi, la police a arrêté quelques dizaines de manifestants qui refusaient de se disperser à la fin du rassemblement de soutien à Mikhaïl Khodorkovski.

Deux à trois dizaines de personnes ont été embarquées dans un car de la police en face du bâtiment du Tribunal intermunicipal Mechtchanski de Moscou.

Ce rassemblement de soutien à l'ex-patron du géant pétrolier YOUKOS, Mikhaïl Khodorkovski et du chef du Groupe financier international MENATEP, Platon Lebedev, n'avait été autorisé que jusqu'à 14.00 heures. Aujourd'hui, au Tribunal intermunicipal Mechtchanski, on donnait justement lecture du verdict.

Plusieurs centaines de membres et de sympathisants du parti "Yabloko" et de l'Union des forces de droite (SPS), ainsi que d'autres partisans de Mikhaïl Khodorkovski ont scandé des slogans en faveur des prévenus et contre le pouvoir judiciaire dans le pays. Il y avait aussi là quelques dizaines de journalistes qui n'avaient pas réussi à pénétrer dans la salle d'audiences. Les manifestants ont même essayé de renverser les barrières métalliques pour se retrouver sur la route, mais les policiers ont coupé court à cette tentative.

Les cris des manifestants "Liberté pour Mikhaïl Khodorkovski!" accompagnaient la lecture du verdict, mais, malgré tout ce bruit, l'audience judiciaire s'est poursuivie sans interruption.

A l'expiration du délai accordé, les policiers ont invité les manifestants à quitter les lieux, mais quelques dizaines de personnes ont refusé d'observer cette consigne. Aussi, la police s'est-elle mise en devoir de déloger les manifestants de la place.

La lecture de la sentence sera poursuivie au Tribunal intermunicipal Mechtchanski mardi 17 mai.

(Novosti, 16.05.2005)

AFP : Procès Ioukos: jugement suspendu mais vers un verdict "coupable"

MOSCOU (AFP)

L'énoncé du jugement du milliardaire Mikhaïl Khodorkosvski, épilogue d'un procès considéré comme hautement "politique", a commencé lundi avant d'être suspendu, mais les avocats de l'ex-patron de Ioukos le disaient "de facto" déjà reconnu coupable de plusieurs chefs d'accusation.
"Le tribunal a établi que...": la juge Irina Kolesnikova a commencé ainsi la lecture du jugement de M. Khodorkovski et de son associé Platon Lebedev, tous deux accusés notamment de fraude et évasion fiscale "à grande échelle et en groupe organisé".
Mme Kolesnikova a lu lundi, pendant près de trois heures, moins d'un quart de l'énorme pile de feuilles qu'elle avait devant elle, avant d'annoncer une suspension jusqu'à mardi matin.
Le tribunal a notamment "établi", a-t-elle listé, l'évasion fiscale, l'acquisition frauduleuse de 44% de l'Institut des engrais, le détournement de fonds provenant des ventes d'engrais de la société Apatit, et la non-exécution des décisions de justice à propos d'Apatit et de l'Institut des engrais.
Ainsi, "le tribunal a de facto reconnu Khodorkovski coupable" des chefs d'accusation cités lundi, a relevé Me Evgueni Barou, l'un des avocats du fondateur du géant pétrolier.
"Il est évident que le verdict sera +coupable+, car le jugement reprend pratiquement point par point toutes les accusations du Parquet", a ajouté son confrère Iouri Chmidt.
Mais le tribunal n'a pas encore fini la lecture des chefs d'accusation (seulement six sur onze ont été énoncés), et surtout n'a pas encore fait état de l'examen des preuves. Enfin, il n'a pas encore formellement "reconnu" les accusés "coupables".
Pour le seul cas Apatit et notamment l'acquisition de 20% de son capital en 1994, représentant les accusations les plus graves, MM. Khodorkovski et Lebedev, qui plaident non coupables, sont passibles de dix ans de prison.
Au total, ils risquent jusqu'à 20 ans si les peines sont cumulées, à l'issue de ce procès de onze mois.
Le Parquet, lui, a requis 10 ans de prison. Et la plupart des experts s'attendent à une peine de cet ordre. Selon eux, les arguments de la défense, dénonçant un procès fabriqué, n'ont aucune chance d'être entendus.
Le verdict lui-même pourrait ne pas être annoncé avant plusieurs jours.
M. Khodorkovski, vêtu d'un jean, d'un polo noir et d'une veste vert foncé, a écouté très calmement l'énoncé du jugement, aux côtés de Platon Lebedev, dans la cage réservée aux accusés.
De temps en temps, souriant, il adressait un salut de la main à sa femme Inna, et ses parents Marina et Boris, présents dans la salle.
"Pratiquement tous les citoyens du pays attendent le verdict du procès de Khodorkovski", soulignait lundi le quotidien Izvestia. "C'est un événement qui, sans exagérer, définira le sens du développement du pays pour de longues années".
Quel que soit le jugement, condamnation ou libération de prison, il sera "la conséquence d'une instruction politique", estimait la société d'investissements UFG, alors que "l'affaire Ioukos" a fortement ébranlé la confiance des investisseurs, inquiets d'une utilisation politique et sélective de la justice.
Devant le tribunal Mechtchanski, quelque trois cents personnes s'étaient réunies lundi pour soutenir celui qui avant son arrestation en octobre 2003 était considéré comme l'homme le plus riche de Russie.
Un cordon de police très serré empêchait les manifestants d'approcher du bâtiment, et les forces spéciales les ont dispersés en milieu d'après-midi.
"Je pense que la peine sera lourde. Si elle avait dû être légère, elle aurait été prononcée" à la date prévue, a relevé la militante des droits de l'Homme Lioudmila Alexeeva, qui a tenu à se rendre devant le tribunal, comme d'autres personnalités, tel l'ancien champion d'échecs Garry Kasparov.
Initialement prévue pour le 27 avril, l'annonce de la sentence avait été repoussée sans explications. Les analystes avaient avancé des raisons diplomatiques, en soulignant que Vladimir Poutine recevait le 9 mai à Moscou tout le gratin international.

(AFP via La Dernière Heure, 16.05.2005)

AFP: Procès Ioukos: Khodorkovski au tribunal pour le verdict

MOSCOU (AFP) - Le milliardaire russe Mikhaïl Khodorkovski, fondateur et ex-patron du géant pétrolier Ioukos, est arrivé lundi au tribunal où doit lui être signifié son jugement.

La lecture du jugement, épilogue d'un procès ayant débuté il y a juste onze mois, a commencé à midi (08H00 GMT). Elle pourrait prendre de longues heures, voire se poursuivre jusqu'à mardi.

La police a formé un cordon très serré autour du tribunal Mechtchanski pour contenir notamment une foule de plusieurs dizaines de journalistes voulant assister à la lecture du jugement. Quelque trois cents personnes, certaines portant des badges représentant le milliardaire âgé de 41 ans, étaient réunies en fin de matinée devant le tribunal pour soutenir M. Khodorkovski. Des personnalités, comme l'actrice Renata Litvinova ou la militante des droits de l'Homme Lioudmila Alexeeva, ont également tenu à faire le déplacement devant le tribunal.

Accusé notamment d'escroquerie et de fraudes fiscales "à grande échelle et en groupe organisé", M. Khodorkovski, comme son associé Platon Lebedev jugé en même temps que lui, risque jusqu'à 20 ans de prison si les peines sont cumulées. Les deux hommes ont plaidé non-coupable. Le Parquet, lui, a requis 10 ans. Et la plupart des experts s'attendent à une peine de cet ordre, estimant que les arguments de la défense, dénonçant un procès fabriqué, n'ont aucune chance d'être entendus dans cette affaire considérée comme étant d'inspiration largement politique.

Vendredi dernier, le Parquet a même prévenu que l'oligarque de 41 ans, qui était avant son arrestation l'homme le plus riche de Russie, ferait "très prochainement" l'objet d'un nouveau chef d'accusation, lié à une affaire de blanchiment d'argent. Des déclarations que la défense a estimées "destinées à faire pression sur le tribunal".

(AFP via Yahoo!, 16.05.2005)

Courrier International : BORIS BEREZOVSKI - La justice française instrumentalisée par le Kremlin ?

Mikhaïl Khodorkovski, ancien patron du groupe pétrolier Ioukos, et Platon Lebedev, son proche conseiller, tous deux accusés d'évasion fiscale et de fraude à grande échelle, attendent aujourd'hui lundi 16 mai le verdict de leur procès, éminemment politique. Et un autre ex-oligarque russe, Boris Berezovski, personnage très influent au Kremlin du temps du président Eltsine, accuse la justice française de le poursuivre pour des motifs politiques en relation avec les autorités russes.

"Le 11 mai 2005, sa villa sur la Côte d'Azur, le château de la Garoupe, a fait l'objet d'une perquisition par la police française sur réquisition de la juge marseillaise Béatrice Del Volgo enquêtant depuis 2002 sur une affaire de blanchiment d'argent présumé par Berezovski" dans le cadre de l'affaire Aeroflot, la compagnie aérienne russe, rapporte Vedomosti.

Tombé en disgrâce depuis l'avènement de Poutine, Berezovski a quitté son pays et a obtenu le statut de réfugié politique au Royaume-Uni il y a deux ans. Si les ministères de la Justice et de l'Intérieur français se refusent à tout commentaire sur l'affaire de la villa de la Côte d'Azur, Berezovski donne une version politique des événements : "Toutes les affaires que l'on a montées contre moi ont échoué, en Angleterre comme en Russie. Mais voilà que Poutine demande de l'aide à son ami Chirac. D'autant plus que, à la veille de l'annonce du verdict contre Mikhaïl Khodorkovski, il lui faut donner l'impression que les oligarques russes criminels se trouvent non seulement à l'intérieur du pays, mais aussi à l'étranger." Et, d'après le quotidien des affaires moscovite, les experts russes considèrent cette version comme "tout à fait plausible".

(Courrier International, 16.05.1005)

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Décidément M. Berezovski ne recule devant aucune bassesse. Je passe devant les accusations ridicules portées à l'encontre des juges marseillais soi-disant à la botte de Poutine. Mais que ne faut-il pas entendre! Berezovski souffre à cause de Mikhail Khodorkovski... Ben voyons. Tous les maffieux russes inquiétés par la justice de quelque pays que ce soit vont maintenant pouvoir se cacher derrière le dos de Khodorkovski ?!
Qui lui, faut-il le rappeler, ne possède pas la moindre propriété hors de Russie, pas le moindre petit yatch, pas même une voiture de course. Qui n'a pas joué à manipuler les médias. Qui ne s'est pas enfui de son pays en abandonnant ses collègues en prison comme l'a fait en son temps Berezovski.
Dé-goû-tée !

Le Nouvel Obs : Portrait Mikhaël (sic!) Khodorkovski


L'un des oligarques russes les plus doués de sa génération, Mikhaël Khodorkovski s'est attiré les foudres du Kremlin en prenant trop d'indépendance dans le secteur pétrolier et en tenant tête à Vladimir Poutine. Son jugement qui devait être prononcé lundi 16 mai est suspendu jusqu'à mardi.
L'ex-patron du groupe pétrolier russe Ioukos s'est enrichi en faisant prospérer une compagnie acquise lors des privatisations controversées des années 1990. Il se retrouve 10 ans plus tard sur le banc des accusés.
Arrêté le 25 octobre 2003, Mikhaël Khodorkovski a été inculpé de sept chefs d'accusation, dont ceux d'escroquerie et de fraude fiscale "à grande échelle et en groupe criminel organisé". Le Parquet a requis contre lui dix ans de réclusion avec confiscation de ses biens. L'homme d'affaires de 41 ans a dénoncé une dernière fois, devant le tribunal qui a clos l'examen de l'affaire le 11 avril, un dossier "monté de toutes pièces".
Son groupe a été pratiquement démantelé en décembre dernier. Les huissiers ont vendu sa principale filiale productrice qui est finalement retombée dans l'escarcelle d'un groupe public, dirigé par un proche de Vladimir Poutine.

La plus grosse fortune de Russie

Mikhaïl Khodorkovski est, avant son arrestation, la plus grosse fortune de Russie (15 milliards de dollars). Tout indique qu'outre la mise au pas de Ioukos "pour l'exemple", il est devenu l'"homme à abattre".
En plus d'envisager un mariage entre Ioukos et la major américaine ExxonMobil, Khodorkovski ouvre ses vastes possibilités financières à l'opposition libérale. Il revendique le droit et le devoir du grand capital de s'impliquer dans la vie politique du pays. "Nous sommes face à un choix réel, entre l'autoritarisme et la société civile. Et nos forces sont plus ou moins égales", déclare-il à l'automne 2003.
Mikhaïl Khodorkovski, père de trois enfants, "ne regrette pas de ne pas avoir quitté le pays. Il savait parfaitement ce qui l'attendait", déclare dernièrement sa mère Marina. Partir "à l'étranger, nous ne l'avons jamais envisagé (...) Notre patrie est ici", souligne sa femme Inna lundi 16 mai dans le quotidien Izvestia.
"Surdoué", "charmeur", "ambitieux", "impitoyable" sont les traits de caractère que lui prêtent sans distinction ses adversaires et ses partisans.
Ses détracteurs lui reprochent d'avoir mangé au même "râtelier" que tous les oligarques, ces hommes d'affaires richissimes proches du Kremlin sous la présidence de Boris Eltsine. Et d'avoir pratiqué dernièrement un lobbying outrancier, notamment auprès des députés, profitant de sa puissance financière pour dicter des décisions au pays.

Valeur boursière multipliée par 120

Ses supporters reconnaissent qu'il a fait de Ioukos la "meilleure compagnie du pays". Sa valeur boursière est multipliée par 120 entre 1998 et 2003 alors qu'il l'a acheté pour une bouchée de pain (350 millions de dollars) en 1995. Khodorkovski en détient un tiers du capital. Pour ses partisans, il est le premier à comprendre la nécessité de faire prévaloir la transparence dans sa compagnie, à l'encontre du climat d'opacité générale qui persiste dans l'économie russe, tout en investissant des millions de dollars dans des infrastructures sociales.
Ses parents ingénieurs ont été très présents pendant le procès. Quadragénaire de bonne éducation, à l'élégance discrète, Mikhaïl Khodorkovski a une enfance ordinaire dans la capitale russe.
Il est diplômé de l'Institut de chimie de Moscou et du prestigieux Institut d'études économiques Plekhanov.
Cadre des Jeunesses communistes (Komsomol) et membre du Parti communiste d'Union soviétique pendant un temps, Khodorkovski n'échappe pas aux deux passages obligés pour qui a de grandes ambitions au pays des soviets. Quand vient la Perestroïka, il gagne rapidement quelques millions de dollars dans des commerces divers.
En 1990, il fonde la banque Menatep qui laisse en plan ses créanciers étrangers lors de la crise financière de 1998. Mais cette banque deviendra par la suite une gigantesque holding coiffant des dizaines de sociétés dont l'ex-numéro un du pétrole russe Ioukos.

(Le Nouvel Obs, 16.05.2005)
15.5.05

Le Monde : Une figure emblématique des oligarques nés sous Boris Eltsine

Tour à tour chimiste, négociant en informatique, banquier, vice-ministre puis magnat du pétrole russe, Mikhaïl Khodorkovski (41 ans) symbolise bien le capitalisme débridé qui se développa, en Russie, avec l'éclatement de l'URSS, fin 1991. Le jeune homme a 25 ans à peine lorsqu'il fait son entrée dans le business.

On est en pleine époque de la perestroïka lancée quelques années plus tôt par le secrétaire général du PCUS, Mikhaïl Gorbatchev. Il s'agit alors d'encourager la libre entreprise, bannie depuis 1926, pour redonner un nouveau souffle économique au pays. Des coopératives, des petites structures commerciales émergent çà et là.

Responsable des jeunesses communistes de l'un des arrondissements de Moscou, le jeune Khodorkovski décide alors de franchir le pas. Il n'a rien à perdre, car, selon les règles en vigueur dans le système soviétique, son nom d'origine juive lui laisse peu de chance d'obtenir un poste en vue, ne serait-ce que celui de directeur d'une usine d'Etat.

Avec quelques collègues de travail, le jeune chimiste commence par vendre des ordinateurs. Bientôt ils créent leur propre banque, la Menatep, dont on dira en Russie qu'elle prospéra sur "l'or du Parti" communiste, disparu au moment de la débandade qui suivit le putsch manqué d'août 1991 contre Mikhaïl Gorbatchev. Faux, rétorquent les fondateurs de Menatep. Très vite, la banque prend de l'importance, c'est elle qui gère notamment des fonds gouvernementaux. Ses directeurs sont à tu et à toi avec l'élite dirigeante.

Comme bien d'autres oligarques russes à l'époque, Mikhaïl Khodorkovski ne rechigne pas à mettre la main à la poche, d'abord pour financer la première guerre (1994-1996) de Tchétchénie (non comptabilisée au budget), ensuite pour soutenir la campagne électorale de Boris Eltsine en 1996. Au gré de l'accord passé alors avec le Kremlin, les fonds alloués par les oligarques pour frais de campagne sont récupérés sous forme d'actions dans les fleurons de l'industrie russe. C'est ainsi que le futur magnat voit tomber dans son escarcelle une compagnie pétrolière qu'il paye le dixième de sa valeur (350 millions de dollars).

Doué d'une énergie hors du commun, le jeune homme veut faire de Ioukos une société à l'occidentale, avec un management et une comptabilité transparentes. Les activités de la banque Menatep passent alors au second plan, surtout après le krach boursier de 1998. Qu'importe si les petits épargnants sont totalement floués. Qu'importe si, au passage, les créanciers allemands et japonais perdent 240 millions de dollars.

Mikhaïl Khodorkovski va bientôt se consacrer uniquement à Ioukos. Il voit grand, ambitionne de financer la construction d'un oléoduc vers la Chine, noue des liens privilégiés avec la Maison Blanche à Washington et les majors américaines, finance des programmes éducatifs, des partis politiques, et finit par énerver le nouveau locataire du Kremlin.

Le 25 octobre 2003, alors qu'il est interpellé sans ménagement par des agents cagoulés, l'oligarque pèse 8 milliards de dollars, selon le magazine américain Forbes. A la veille de son arrestation, il était en train de bâtir des plans pour céder 25 % des actions de Ioukos à Chevron ou à Exxon Mobil. L'affaire lui aurait permis d'engranger 6 milliards de dollars et donc de se poser en adversaire du pouvoir pour les élections législatives (décembre 2003) et présidentielle (mars 2004) qui s'annonçaient.

Marie Jégo

(Le Monde, 18.05.2005)

Voilà: Nouveau chef d'accusation contre Khodorkovski et Lebedev

L'ex-patron de Ioukos Mikhaïl Khodorkovski et son associé Platon Lebedev, qui attendent en prison leur verdict prévu lundi, feront l'objet d'un nouveau chef d'accusation lié à une enquête sur le blanchiment d'argent, a annoncé vendredi le Parquet, cité par l'agence Interfax.

"Les enquêteurs prévoient très prochainement de présenter un nouveau chef d'accusation à Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev" a déclaré Natalia Vichniakova, porte-parole du parquet général.

L'accusation est liée à une enquête sur "la légalisation de sommes acquises de façon criminelle" et porte "sur plusieurs milliards de roubles", a précisé la porte-parole.

M. Khodorkovski, ex-patron du groupe pétrolier russe, attend son verdict lundi dans un procès où il faisait l'objet de sept chefs d'accusation, notamment d'escroquerie et fraude fiscale "à grande échelle et en groupe criminel organisé". L'accusation a requis une peine de 10 ans de prison.

(Lu dans Voilà, le 13.5.2005)

____________________

Cela fait un moment que l'on s'en doutait. Déjà cet hiver, lors de mon passage au Tribunal Meschansky (là où se déroule le procès de Mikhail Khodorkovski), j'avais entendu des bruits à ce sujet.

La raison est simple - le système pénitentiaire russe est ainsi fait qu'un accusé condamné ne reste pas en prison, il est envoyé dans une colonie pénitentaire (camp de travail), héritage du système du GOULAG. Mais bien que les conditions dans les camps puissent être extrêmement pénibles (comme dans celui que j'ai visité en janvier au delà du cercle polaire, à Vorkouta), on y est tout de même plus libre qu'en prison, avec parfois des permissions pour aller travailler à l'extérieur du camp. On y est également moins surveillé qu'en prison, et les visites y sont généralement aussi plus facile. Enfin, les camps sont généralement situés loin de Moscou...
Pour le pouvoir, il est plus commode de tenir Khodorkovski dans une cellule de quelques mêtres carrés à Moscou que de l'expédier dans un camp. La surveillance y est plus facile, les moyens de pression plus aisés.

De plus, cette "récidive" d'accusation répond à un besoin de propagande crucial pour le pouvoir. Les officiels sont en train de perdre le procès Yukos devant l'opinion publique. Si en octobre 2003 l'arrestation de Khodorkovski avait fait sensiblement monter la côte de popularité de Poutine avant les élections, maintenant l'affaire Yukos a un effet inverse. Dans son bras de fer contre la compagnie et contre Khodorkovski, le pouvoir a commis les mêmes fautes devant la loi et la morale que celles qui sont reprochées aux accusés. De plus, le personnage de Khodorkovski a bien peu justifié les espoirs de ses ennemis : il se montre d'une fermeté, d'une dignité et d'une courtoisie exemplaires durant les débats, il ne possède ni propriété somptueuse, ni comptes en suisses dont les média pourraient faire étalage. Et ceux-ci n'ont même pas la ressource de se rattraper sur les dépenses somptuaires réalisées par les ex-collègues de Khodorkovski, car cela ne ferait que renforcer le sentiment d'arbitraire que suscite dans la population la persécution du seul patron de Yukos. Reste donc à ressasser et faire "mousser" auprès du public toujours les mêmes accusations, à les fragmenter et en ruminer chaque miette, afin de réchauffer l'indignation bien érodée du public. Mais là encore, c'est sans compter sans l'intelligence et le sens de l'absurde des Russes...
13.5.05

Libé: Ioukos condamnée à verser 22,4 milliards de dollars à Rosneft

MOSCOU - La société pétrolière d'Etat Rosneft a remporté une victoire judiciaire contre le groupe Ioukos, auquel elle réclamait 62,4 milliards de roubles (22,4 milliards de dollars).

Le tribunal de Moscou lui a donné raison. D'après les analystes, cette décision permettra au Kremlin de prendre le contrôle des derniers actifs du groupe.

L'annonce du verdict a provoqué une nouvelle plongée du titre.

A l'appui de sa plainte, Rosneft avait fait valoir que Iouganskneftegaz, ancienne filiale de Ioukos qu'elle a acquise en décembre, n'avait pas été payée par Ioukos pour des livraisons de pétrole reçues entre juillet et décembre dernier.

Le jugement ne constitue toutefois qu'une étape, car Rosneft réclame au total 13 milliards de dollars au nom de Iouganskneftegaz. Ce montant correspond à des livraisons non réglées, des dettes fiscales et des manques à gagner.

Si Rosneft remporte la totalité de ses procès, elle deviendra probablement le principal créancier de Ioukos, estiment les analystes.

Dans cette hypothèse, elle pourra demander la liquidation du groupe et s'emparer de ses derniers actifs, soit deux unités de production pompant 500.000 à 600.000 barils par jour et cinq raffineries. Cela reviendrait à une renationalisation de fait.

Les autorités russes, qui réclament 27,5 milliards de dollars d'arriérés d'impôts à Ioukos, ont procédé en décembre à la vente forcée de Iouganskneftegaz, sa principale filiale de production de pétrole. Cette dernière a d'abord été acquise par une mystérieuse société écran avant d'être revendue à Rosneft.

Ioukos affirme que ses démêlés sont orchestrés par le Kremlin qui punirait ainsi les ambitions politiques de son fondateur, l'"oligarque" Mikhaïl Khodorkovski, actuellement jugé pour des délits financiers remontant à la privatisation d'une firme d'engrais en 1994.

(Lu dans Libération, le 13.05.2005)
___________________

27 milliards de dollars par ci, 22 par là... C'est vraiment du délire.
1.5.05

Le Monde : Leonid Nevzline tente d'organiser l'opposition russe en exil

Assis dans le salon de sa villa au nord de Tel-Aviv, entouré d'une collection de statuettes japonaises représentant des samouraïs, Leonid Nevzline mène son combat contre Vladimir Poutine. Agé de 45 ans, cet oligarque russe vit depuis août 2003 en Israël, où il s'est réfugié pour fuir la justice russe. Moscou a émis à son encontre un mandat d'arrêt international pour "complicité de meurtre" dans le cadre de l'affaire Ioukos, la compagnie pétrolière russe que le Kremlin a entrepris de démanteler et de transférer à des structures contrôlées par l'Etat.Vêtu d'une chemise déboutonnée et de jeans, l'allure juvénile, Leonid Nevzline n'a pas de mots assez durs pour parler du régime de Vladimir Poutine. Il accuse le Kremlin d'être au coeur du "système de corruption qui sous-tend tout l'Etat russe, jusqu'au plus haut niveau" et d'avoir monté de toutes pièces le procès contre son ancien associé, Mikhaïl Khodorkosvki, l'ancien patron de Ioukos, afin de mettre la main sur sa compagnie.

AMBIANCE CALIFORNIENNE
Leonid Nevzline est devenu, au fil des mois, le chef de file des oligarques russes en exil qui ont juré la perte de Vladimir Poutine. Sa fortune, évaluée en 2003 à 2 milliards de dollars par le magazine Forbes, a subi le contrecoup des poursuites judiciaires et des saisies d'actifs visant Ioukos, mais elle reste conséquente. Leonid Nevzline contrôle aujourd'hui, à lui tout seul, 67 % du capital de la holding Menatep, enregistrée à Gibraltar, qui détient plus de 60 % de Ioukos.
Dans la quiétude du quartier balnéaire aisé de Hertsélia Pitouach, noyé dans les pins, les lilas et les palmiers, Leonid Nevzline passe le gros de ses journées pendu au téléphone avec Moscou et avec d'autres hommes d'affaires russes, exilés en Israël ou à Londres. Il reçoit régulièrement des émissaires venant de Moscou, dans cette maison à l'ambiance californienne. Les baies vitrées s'ouvrent sur un jardin avec piscine, et le garage abrite une luxueuse décapotable.
Leonid Nevzline multiplie les tribunes dans la presse russe et cherche à fédérer des forces politiques contre le pouvoir de Vladimir Poutine. En Israël, il compte comme soutiens l'ancien dissident Natan Chtcharanski, "un des leaders mondiaux de la pensée politique" , selon lui, et Benyamin Nétanyahou. Il a investi dans le secteur pétrochimique israélien et a fondé un institut portant son nom, le Centre de recherches Leonid Nevzline pour les juifs de Russie et d'Europe de l'Est, qui veut venir en aide aux immigrés arrivant en Israël.
A 4 000 km de là, son ancien partenaire, Mikhaïl Khodorkovski, croupit depuis octobre 2003 dans une cellule de la prison Matrosskaïa Tichina de Moscou, en attente du verdict de son procès pour "évasion fiscale à grande échelle" , qui doit être prononcé le 16 mai. Mikhaïl Khodorkovski risque dix ans de prison. Les deux hommes, liés par une vieille amitié, s'étaient rencontrés à la fin des années 1980, pendant le "boom" des coopératives d'étudiants autorisé par Gorbatchev, qui avait jeté les fondements du nouveau capitalisme russe. "On a été au coeur de cette révolution des mentalités" , dit-il avec fierté.
Les deux partenaires avaient ensemble développé une banque, Menatep, qui allait bénéficier de nombreux transferts de fonds du budget fédéral russe et remporter, en 1995, des enchères contestées pour acquérir la société Ioukos. Ils avaient, au passage, financé la réélection de Boris Eltsine, en 1996. Ioukos s'est ensuite hissé au rang du numéro un du pétrole russe, avec une capitalisation d'environ 40 milliards de dollars. La chute de ces oligarques et le démantèlement de leur empire sont des faits marquants de la présidence de Vladimir Poutine.
Qui Leonid Nevzline tient-il pour responsable de cette disgrâce ? La version la plus couramment mise en avant en Russie met en cause des personnalités issues du KGB, entourant M. Poutine, qui chercheraient à rétablir l'autorité de l'Etat dans le secteur des hydrocarbures afin de renforcer le poids du pays sur la scène mondiale. Leonid Nevzline complète cette explication en évoquant un scénario fait de nouvelles luttes de clans, où le principal gagnant serait non pas l'Etat russe, mais l'un des oligarques les plus mystérieux de Russie, Roman Abramovitch, 38 ans, classé cette année "première fortune du pays" par Forbes, avec 15 milliards de dollars.
En 2003, l'année où les ennuis judiciaires de Ioukos ont commencé, Roman Abramovitch avait tenté de faire fusionner sa société pétrolière, Sibneft, avec Ioukos. Le projet a fait long feu.
"Je sais qu'Abramovitch a été le principal artisan de la campagne contre Ioukos" , affirme Leonid Nevzline dans un entretien accordé au Monde, jeudi 28 avril, alors que le président russe effectuait une visite officielle en Israël. "Il voulait mettre la main sur Ioukos. Grâce à ses relations passées avec la "famille Eltsine" et son amitié avec Poutine, dont il est, je pense, un partenaire financier, Roman Abramovitch contrôle les services du procureur général de Russie, avance l'homme d'affaires exilé. J'ai moi-même entendu Roman Abramovitch dire, au début du pouvoir de Poutine, que "tout était arrangé" : le secteur du gaz -le géant étatique Gazprom- irait aux gens de Poutine, tandis que lui, Roman, aurait le secteur du pétrole."


RELENTS D'ANTISÉMITISME
Il fut un temps où Leonid Nevzline participait activement à la vie publique en Russie, comme membre du Conseil de la Fédération russe (élu en 2001) et président du Congrès juif. Le portrait qu'il dresse de la Russie de Vladimir Poutine est celui d'un pays où des postes au sein des institutions d'Etat sont mis en vente par le Kremlin "au plus offrant" , et où des grosses entreprises donnent des enveloppes d'argent à des "membres du Parlement, des forces de l'ordre, du parquet" , pour parvenir à leurs fins. "La société Rosneft, entièrement dirigée par Igor Setchine, qui est un proche de Poutine, a payé pour la campagne contre Khodorkovski au sein des médias et dans les organes judiciaires russes" , ajoute-t-il.
Leonid Nevzline estime clairement ne plus avoir grand-chose à perdre en se livrant à de pareilles accusations. La holding Menatep, qu'il contrôle, a cessé toute activité en Russie et a investi dans les hydrocarbures et les télécommunications en Europe centrale. Leonid Nevzline se dit prêt à financer des opposants politiques au régime de M. Poutine en Russie et appelle de ses voeux un "changement de régime" , même s'il juge peu probable un scénario semblable à ce qui s'est produit en Ukraine et en Géorgie. Il dit s'appuyer sur un "bon réseaux de contacts" au Etats-Unis.
Devenu en 2003 citoyen israélien, Leonid Nevzline coordonne ses activités avec d'autres oligarques russes en exil. Parmi eux : ses amis actionnaires de Ioukos, Vladimir Doubov et Mikhaïl Broudno, qui vivent à Tel-Aviv ; l'ancien magnat de groupe médiatique russe, Vladimir Goussinski, ainsi que Boris Berezovski, qui a obtenu le statut de réfugié politique à Londres, et un proche associé de ce dernier, l'homme d'affaires Badri Patarkatsichvili, réfugié en Géorgie. Tous ces millionnaires recherchés par la justice russe sont d'origine juive, ce qui fait dire à Leonid Nevzline, qui se revendique "sioniste et russophile" , que la politique du Kremlin serait animée de forts relents d'antisémitisme. "Poutine n'a pas d'amis en Israël" , insiste-t-il.


(Lu dans Le Monde, le 30.04.2005)

Signalons que par l'intermédiaire de ses avocats, Mikhail Khodorkovski a publié le 4 mai le texte suivant :
"En réponse aux demandes que les journalistes m'ont adressées, par l'intermédiaire de mes avocats, de commenter les récentes interventions publiques de Léonid Nevzline, je voudrais dire la chose suivante:
Dans une société libre chacun à le droit d'exprimer ses idées, aussi je ne commenterai pas les déclarations me concernant de mon ami et ex partenaire d'affaires, bien que, je ne le cache pas, je sois étonné. Je ne veux pas devenir la cause de confrontations dans la société, et j'exprimerai moi-même mon point de vue, car malgré les conditions de vie spécifiques qui sont les miennes en ce moment, je suis à même de me faire une opinion sur les questions essentielles du développement de la Russie, et de me faire entendre de la société et des média. Je ne me considère pas coupable, aussi suis-je décidé à défendre ma liberté par des moyens légaux. Je demande à mes amis et ennemis, amis ou étrangers, de ne pas se servir de mon nom comme d'un étendard pour des projets politiques ou para-politiques don je n'approuve pas le contenu."

Pourquoi l'Observatoire?


L'arrestation du PDG de la compagnie pétrolière russe YUKOS Mikhail Khodorkovsky marque un tournant important dans l'histoire de la Russie contemporaine. Incarcéré le 25 octobre 2003, il a été condamné à l'issue d'un procès inquisitorial à huit ans de camp de travail.



M. Khodorkovsky durant son procès


Son directeur financier, Platon Lebedev, a reçu la même peine. La dureté de ce traitement, disproportionnée par rapport aux faits qui leur sont reprochés, laisse supposer des motifs politiques dans l'affaire YUKOS : Mikhail Khodorkovsky est en effet connu pour ses convictions libérales et pour le soutien financier qu'il a apporté aux partis d'opposition lors des dernières élections.
Parallèlement, la compagnie YUKOS dont il était également le principal actionnaire a été soumise à des redressements fiscaux successifs toujours plus exorbitants, qui ont servi de prétexte à confiscation de la plupart des actifs de la société.
Pour tenter de pallier un certain déficit d'information en langue française, je me propose de donner - dans la mesure de mon temps disponible - une couverture au jour le jour de ce qui est perçu en Russie comme "le procès du siècle".

L'Observatrice



Recherche sur le site:

Articles précédents


Vladimir Pereverzine, libre et révolté.

Bonne Année 2012 !

15 décembre.

Khodorkovsky - LE FILM.

Vassili Alexanian, une interview inédite.

Vassili, le dernier adieu.

Vassili Alexanian est décédé

Le Figaro: Au dernier jour de son procès, Khodorko...

Point final dans l'Affaire Alexanian

Le Figaro: Plus de procès pour un ancien de Ioukos



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L'affaire Yukos sur Internet


Centre de Presse de Mikhail Khodorkovsky
Centre de Presse de Mikhail Khodorkovsky (en anglais et en russe)

Centre de presse de Platon Lebedev
Centre de presse de Platon Lebedev en anglais et en russe

SOVEST - Groupe de soutien à Mikhail Khodorkovsky
Groupe "SOVEST" ("Conscience" en russe) : Groupe de soutien à Mikhail Khodorkovsky (en français)

The Mikhail Khodorkovsky Society
The Mikhail Khodorkovsky Society (blog anglophone)

Yukos Shareholders Coalition
Coalition des actionnaires de Yukos pour poursuivre en justice le gouvernement russe (anglais)

Dossier du journal Novaya Gazeta sur l'affaire Yukos
Dossier du journal d'opposition Novaya Gazeta sur l'affaire Yukos (en russe)

Fond Mission libérale
Excellent site du Fond "Mission libérale" (en russe). Sur l'affaire Yukos et, beaucoup plus largement, sur le libéralisme en Russie

Bibliographie


Je vous propose une sélection de documents en français, anglais ou russe


Sur le procès et l'affaire Yukos

Patrick Klugman : En défense de Mikhail Khodorkovski

André Gluksmann : Mikhail Khodorkovski prisonnier de la verticale du pouvoir

Film BBC "Russian Godfathers 2: The Prisoner" (Youtube, en 6 parties)

Rapport d'experts étrangers sur le déroulement du procès (eng, .pdf, 81 KB)

Analyse des accusations par les avocats de la défense (eng, .pdf, 153 KB)

Sur Mikhail Khodorkovsky

"Le roi du pétrôle piégé par ses ambitions", Hélène Depic-Popovic, Libération, 27.10.2003

"La mutation d'un oligarque", Nathalie Nougayrède, Le Monde, 21.11.2003

"A falling Tsar", Chrystia Freeland, The Financial Times, 01.11. 03 (eng)

"Yukos, a Case Study" by Konstantin Korotov, Stanislav Shekshnia, Elizabeth Florent-Treacy and Manfred Kets de Vries, (eng, .pdf, 589 KB)

L'affaire Yukos dans :


  • Yahoo! News
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    Presse sur internet

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